jeudi 19 janvier 2012

"No thank you no sorry"

...Voila la devise de l'un de mes amis indiens.

Je suis si occupee a vivre que je ne trouve guere le temps d'ecrire! Pardonnez l'absence de photos, mon appareil est brise, je dois le faire reparer quand j'irai dans la grande ville...Mais laquelle???
Je souffre en ce moment d'un trop vaste choix de destinations, avec ma curiosite naturelle, pour ne pas dire ma legendaire boulimie de nouveaute, c'en est presque paralysant! Je regarde mon guide Lonely planet, une brique de centaines de pages, et ma confusion augmente. Je devrais aller vers le nord, mais mon coeur a envie de redescendre au sud voir mes nouveaux amis du Kerala!

Il y aurait toute une galerie de portraits vivants a faire: une jeune fille belle comme une princesse qui balaie le trottoir avec une grace incroyable, une vielle femme edentee qui gagne sa vie a vendre des fruits assise a meme la rue, un receptionniste d'hotel qui etudie en travail social et reve de devenir agent secret pour le gouvernement (?), un mandiant souriant malgre son handicap, une blanchisseuse affairee, croulant litteralement sous les piles de linges, qui reussit a retrouver ma commande, sans coupon(!), lifeguard irritant et moustachu qui use abusivement de son sifflet des qu'on s'eloigne trop, un serveur tenebreux qui m'hypnotise en me sussurant ; "I think you like spicy..." et qui me propose de me donner des lecons privees de danse bollywood, les petits gitans crasseux qui nous poursuivent de leurs grands yeux ...et enfin mes amis.

Arun, qui a etudie en hotellerie et en tourisme, puis a fait sa formation pour etre agent de bord, reve de pouvoir aider ses parents et son frere (qui souhaite etudier aux Etats-unis). Il est super sociable, beau et gentil et malgre une douzaine d'entrevues n'a pas encore de travail (discrimination positive envers les femmes!). Son frere Lalou, mon prof de massage, est en realite son cousin, mais il s'aiment et se considerent comme des freres.  Lalou travaille enormement, et ce pour un salaire de misere, afin de soutenir sa mere, depuis que son pere a quitte le domicile pour refaire sa vie ailleurs, abandonnant sa famille... Je vous dis cela pour que vous sachiez a quel point j'admire la bonte de ces gens et leur tenacite. Je trouve que ma vie au Quebec est facile, d'une facon disproportionnee,comparee a la leur... C'est injuste! Leur horizon est bloque par les problemes financiers. J'aimerais les aider. J'ai un autre ami tres special, un commercant  philosophe, drole et vraiment attachant: il me sort toujours des trucs mi-farfelus, mi-spirituels, il me surprend chaque fois que je lui parle. Cet homme-la, meme son silence est eloquent, je ne me suis jamais ennuyee a ses cotes. J'espere le revoir!

Un jour, sur la plage, les pieds dans le sable, j'ai ressenti fortement que , ou que je sois dans le monde, c'est la meme terre sous mes pas, et cela m'a reconfortee. C'est la meme humanite partout, avec sa quintessence et sa deliquescence! Je suis a ma place, ici ou ailleurs, ou que je sois!  Je vis parfois des moments d'intense presence au monde, a moi-meme, entrecoupes de moments de fatigue, d'impatience, de distraction. C'est la vie, la vraie, qui continue. Je ne suis ni meilleure ni pire en voyage, je suis moi, en transition, comme une chrysalide...

Ouaouf, je suis decousue, affamee, mais je veux vous en donner encore un peu, vous faire voyager avec moi.

Retour a la chronologie: le dernier traitement que j'ai recu de Lal m'a rendue euphorique, Il s'agit du fameux massage fait avec les pieds! AAAH! Profond, enivrant,stupefiant! Tres puissant. C'est sur table, et le donneur se tient a un linge suspendu au plafond pour garder son equilibre. Il se sert de tout son pied et talon pour faire un travail etonnamment precis, rapide et energique, avec de longues manoeuvres.Mais quel exploit acrobatique, qui requiert une souplesse et un equilibre peu communs! Je riais de plaisir, ce qui semblait rendre mon massotherapeute perplexe, puiqu'il ne cessait de me demander: are you alright?!

Le dernier soir j'ai regale mes amis, on s'est fait un petit picnic improvise, dans le centre de massage, puis depart avec Arun pour Goa, c'etait son reve!Il voulait voir le nightlife. Car c'est le seul endroit ou on peut faire la fete jusqu'a 3h am. Partout ailleurs, a cause des lois anti-bruit, les bars cessent la musique a 22 ou 23h, meme a Dehli ou Mumbai, incroyable, non? Donc, nous prenons le train et le controleur nous fait remarquer que oui on va a Goa mais qu'on est pas dans le bon train! Zut de...Je dois payer de nouveaux billets, mais le probleme c'est qu'on a pas de sieges! Et c'est un trajet de 20h! Je me vois deja passer ce temps debout a cote des chiottes et je deprime grave!
Une famille adorable me fait une place, on se serre, ils rient de notre mesaventure, et m'offrent du riz sucre a la cardamone, en dix minutes le bad trip est devenu une belle rencontre. Deux personnes de cette famille parlent anglais et servent d'interpretes. Une des femmes a mal a la tete, je lui fais un massage et lui donne de l'aspirine, puis leur offre a mon tour de la nourriture. Le hic, c'est que mon ami est assis a six wagons de la, ce qui n'est pas pratique. Le train ressemble a une prison roulante, pas climatisee, au plus chaud du jour je suis assommee, liquefiee par la chaleur, je somnole. Puis, la nuit sera tres fraiche, quasi glaciale. Mais de bons samaritains nous trouvent finalement une couchette, tout finit bien! Merci a ces anges gardiens.

Goa decoit mon cher Arun, ca ne ressemble pas a ce qu'il en a vu dans les films, il y a trop de locaux a son gout! On sort quatre soirs de suite, on danse a fond dans des boites trop climatisees, on attrape le rhume!
La plage est interminable, les petits restos tous pareils, interchangeables. Plein de moto marines, pas tres charmant. A part Anjuna, ou il y a une faune marginale semblable a ce qu'on verrait a Montreal ou Barcelone. On se loue un scooter pour explorer un peu, A est bon conducteur, je me laisse conduire!
Puis, c'est a Goa que je me paye un cadeau de fete en avance: je me fais teindre les cheveux en rouge!
La semaine s'acheve et on doit se separer, Arun repart vers Kovalam et moi vers Hampi. Le coeur serre, on se dit non pas adieu mais aurevoir! A est un compagon attentionne, c'est agreable de le cotoyer. Il dit: "my firends are my backbone, I must care for them." Un bon gars! (Et un excellent danseur, wow!)

Je me suis tape un penible trajet de nuit dans une machine infernale usurpant le nom d'autobus...
La suspension etait finie, donc bonjour le sommeil, impossible, sans oublier la conduite style rodeo du chauffeur et le vent glace qui s'engouffrait par la fenetre! Arrivee courbaturee et pochee a Hampi, mais eu la chance de rencontrer un Francais sympa avec qui je partage une hutte en bambous. Tom a 37 ans et est comme moi en voyage pour un an. On est au bord d'une riziere, et c'est un lieu absolument magique, le plus bel endroit que j'aie vue jusqu'a present, rempli de ruines et de temples. Hier, nage dans un lac abritant des alligators (on est restes pres du bord!) et visite un temple perche au sommet d'un monticule rocheux, pres de 600 marches a grimper pour avoir la satisfaction d'etre dans le lieu de naissance suppose d'Hanuman, dont les petits freres, des singes graciles, ont investi les lieux et sont gaves de bananes par les touristes.
Vu un grandiose coucher de soleil, merci la vie pour un jour de plus! Voila ou j'en suis rendue. Gratitude.


Fatiguee mais contente!

mardi 3 janvier 2012

Mother India!

Il parait que les Indiens concoivent leur pays comme feminin; je vous dirai si je partage cette impression apres quelques mois. Je suis ici depuis peu, mais je prophetise que je ferai partie de ceux qui aiment. Car on dit souvent que cette terre si coloree ne laisse personne indifferent: on adore ou on deteste! C'est a suivre...

Ce matin, les yeux encore tout colles, je vais prendre un chai au resto local du coin, et j'apercois une magnifique jeune femme avec des rastas (snake hair) qui joue du jazz sur un trombone a coulisse en plastique! Laura est anglaise, elle est venue etudier le yoga et c'est un rayon de soleil sur deux pattes. En meme temps, je retrouve un autre British que j'avais deja vu, (Nomis, ca sonne egyptien!) on verra peut-etre a Goa: il aura une maison pretee par des amis indiens et aime avoir de la visite! Laura dit : l'Inde deplait aux gens qui veulent absolument etre en controle... Donc je presume que c'est une bonne ecole pour ce fameux lacher-prise! Une des choses que j'aime ici, c'est que meme si les gens travaillent de longues heures, ils ne sont pas stresses ou agites et prennent le temps de jaser juste pour le plaisir, ca me parait tres civilise comme attitude!!! Il ya une douce magie a rencontrer plein de gens si differents les uns des autres.

Ici, a Kovalam, au bord de l'eau, il y a beaucoup de gens du "Kashmiri", ils sont musulmans et ont une culture et une langue differente des locaux, qui parlent Malayalam, un dialecte beau et apparemment difficile a apprendre. Il arrive que les indiens parlent anglais entre eux, ce qui m'etonnait au depart car je croyais que tout le monde connaissait l'hindoustani, mais ce n'est pas le cas. L'anglais est donc tres rassembleur, tant mieux pour nous touristes!

 J'adore manger avec la main,  la nourriture est d'ailleurs excellente, c'est le paradis des vegetariens! Quoiqu'il y a aussi beaucoup de friture, il faut savoir choisir. Je peux avoir un repas nourrisssant pour une somme ridicule, allant d'un a cinq dollars. Internet : 1$ l'heure. La chambre que j'ai en ce moment coute 6$ la nuit. Pour vous donner une idee...Un massage c'est 10$; je me suis achete un cellulaire neuf  (25$) et ca me coute 1$ par semaine pour m'en servir! Donc c'est bon pour le portefeuille, moins cher que Bali, et je ne connais meme pas encore toute les astuces pour economiser (annee sabbatique oblige, je dois surveiller mon budget).

A mon arrivee a Trivandrum, apres avoir dormi par terre dans l'aeroport de Chennai (8h d'attente pour un vol d'une heure!) j'ai eu un moment de blues, car c'est une ville laide, remplie de panneaux publicitaires, polluee, bruyante, et les gens ne souriaient pas beaucoup, affaires et presses. Un choc apres la douceur suave de Bali, et une certaine solitude apres avoir vu ma grande amie: je n'en menais pas large!
Heureusement j'ai eu la bonne idee de bouger, et je suis venue ici, dans ce petit village de pecheurs devenu un resort (maaagnifique plage, propre avec belles vagues) pas trop gros, vraiment l'endroit ideal pour aterrir!

Je suis dans le Kerala, tout au sud,  la province la plus reputee pour l'ayurveda, qui est une science ancienne (vieille de 5000 ans) pour maintenir une sante optimale, grace a differents soins a base de plantes, des bains de vapeurs, des massages, etc. J'en ai donc profite pour suivre un cours de 15 jours, j'ai eu la chance de trouver un enseignant a la fois gentil et professionnel, ainsi j'ai eu un cours prive! Je peux, sans pretendre etre une experte, faire un bon massage d'une heure et demie. C'est vigoureux, l'emphase est mise sur la circulation sanguine et certains points d'acupression (marmas, comme en acupuncture, et reflexologie)  Le matin, c'etait la partie theorique et la demonstration et  l'apres-midi, je devais pratiquer et m'exercer. Le frere de mon prof, qui me servait de cobaye, est charmant et m'a amenee faire un tour de moto dans la montagne voisine. Je nage dans la mer une a deux fois par jour, ca me fait un bien fou! Je suis totalement heureuse quand je suis dans l'eau... Il fait soleil tous les jours!!! Assez chaud mais supportable. Il y eut deux grosses averses seulement (un orage le 25 dec et une forte averse le 31!) Ah oui: il y a souvent des pannes d'electricite le soir.

J'ai vecu une drole d'experience le jour de l'an: je suis sortie avec deux amis, nous sommes alles danser dans un hotel, ou il y avait un DJ, eh bien tenez votre tuque il y avait la environ 150 Indiens et...une seule femme, moi en l'occurence! Mes deux amis, tres gentlemen, ont du jouer les gardes du corps, puisque tous voulaient me parler, me serrer la main ou plus (!). Vers 11h deux jeunes femmes Russes tres sexy sont arrivees, dans un etat d'ebriete avance, et cela a mis le feu aux poudres: un gars a touche l'une d'elles, il y eut une petite bagarre avant que le mec soit expulse et les filles ont decampe. Il faut un minimum de jugement quand on vient ici, il faut savoir s'adapter a la culture locale, notamment pour ce qui est de l'habillement et de l'attitude.

J'ai donc eu la chance de placoter et de fraterniser avec differentes personnes, c'est vrai que je suis sociable et m'adapte facilement, la preuve: je me sens confortable ici, j'ai un mini reseau social et me sens chez moi!
Donc, partir d'ici sera un certain arrachement...Je me donne encore quelques jours pour penser a ma prochaine destination.

Il ya des moments ou je me sens vide, ou ca me fait bizarre de ne pas avoir d'horaire ni de plan, mais je pourrais y prendre dangereusement gout! Ah! Anecdote vraiment loufoque: j'ai eu l'impression de faire un mauvais reve l'autre jour, quand une grosse vague m'a carrement arrache mon haut de bikini... Imaginez la scene: il y a au moins une centaine de quidams, dont beaucoup d'hommes evidemment; j'ai un pareo hors de l'eau mais il est loin, que faire?! Je suis restee imergee, les mains sur ma poitrine, jusqu'a pouvoir parler a la ronde et m'expliquer  et apres q-ques minutes un jeune homme m'a offert son t-shirt afin que je puisse sortir  en toute dignite! (Ouf!) J'ai quand meme bien ri apres, c'etait quasi surrealiste! Le miracle, c'est que quelqu'un m'a rapporte mon maillot, il l'a trouve par hasard en nageant. Chanceuse dans ma malchance, comme on dit!
Depuis ce jour, je nage avec un chandail par-dessus mon bikini, on ne m'y reprendra plus!

Le matin est le moment que je prefere: sur la plage, des familles s'ebattent (tout habilles) dans l'ecume avec leurs enfants, des jeunes jouent au foot, au baseball ou au frisbee, certains (touristes et locaux) font du jogging ou du yoga, des chiens batifolent, et des pecheurs remontent leurs filets en chantant! Ils utilisent encore de longs bateaux traditionnels en bois, semblables a des pirogues avec de minuscules rames. L'effort demande pour les mettre a l'eau est considerable, mais tous mettent la main a la pate avec bonne humeur, et les passants aiment venir donner un coup de main. J'ai moi-meme ete invitee a tirer un filet avec une douzaine de pecheurs et je leve mon chapeau a ces gens, ils sont tres endurants physiquement! Leur chant rythme me rappelait la musique africaine: un homme commence, le groupe repond en choeur... (L'autre jour, mange de l'espadon cuit au tandoori)

Je vous reviendrai des que je peux, d'ici la profitez du moment, jouissez de la neige pour moi s'il vous plait
 et moi je boirai un lassi aux fruits tropicaux a votre sante!

Namaskaram!