C'est une vision captivante qui va me manquer: ces dizaines de losanges ludiques et multicolores qui tourbillonnent dans le ciel, manoeuvres par des gamins au sourire epanoui. Un matin j'en ai compte plus de trente, debout sur le toit de l'hotel apres mes salutations au soleil; c'est un passe-temps apprecie au Nepal.
Je n'en reviens tout simplement pas de voir combien rapidement les deux dernieres semaines ont file!
Le 19 octobre, j'ai passe l'apres-midi a Pashupatinath, un temple hindou avec ghats de cremation, sorte de mini-Varanasi flanque de sa poignee de babas peinturlures et couverts de cendres qui se font tirer le portrait moyennant quelques roupies, de singes chapardeurs en goguette au milieu des vendeurs de the trop sucre, sans oublier ces familles entieres multipliant les actes de devotions; certaines souriantes et d'autres en pleurs, accompagnant la depouille d'un aine dans son dernier rituel au bord de l'eau...bref, je me serais crue retournee en Inde, avec la musique, les sons de cloche, les psalmodies et les odeurs de ghee des lampes!
En fin de journee, je suis invitee dans la famille de Luan et d'Ellen, deux soeurs charmantes rencontrees au festival de musique de Patan, un mois plus tot. Nous etions restees en contact via Facebook et j'ai ete recue de facon tres chaleureuse par toute la famille: ils etaient rieurs, ca respirait le bonheur dans cette maison. La nourriture fut delicieuse et la soiree memorable, dans une rare bonne humeur pleine d'humour. C'etait l'anniversaire de Luan, nous avons mange le gateau avant le souper, etrange. Il y avait des tantes, oncles, cousins et Mamou, la grand-mere frele et souriante, qui me rappelait un peu Ti-Guite, ma propre mamie aux yeux petillants de douce malice. Nous avons mange assis par terre, puis j'ai placote avec les jeunes dans la chambre, enfin nous avons chante quelques bajhans dans le salon, ce fut leger et joyeux! On m'a garde a dormir, et meme si j'ai bien trop mange, ce fut reposant. C'est une famille aisee, ils ont une belle maison.
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Au matin, la famille au complet voudrait me garder mais j'ai rendez-vous avec Dinesh, je me rends chez lui a Changu Narayan, je suis tres contente de le revoir et de rencontrer sa mere Benita et sa soeur Sunita. Sa maison est modeste mais situee dans un lieu enchanteur, a dix minutes a pied du village, donc nul bruit de voiture et superbe vue sur les environs. Ils n'ont ni salle de bain, ni eau courante; ils vont a la fontaine publique pour avoir de l'eau et partagent une "becosse" avec les voisins. Jusqu'en 2010, ils vivaient dans une seule piece mais ils disposent maintenant de trois (petites) pieces; la jeune soeur dort dans la cuisine. Ils doivent se laver tout habilles, dehors et brulent leurs dechets dans la cour. La nuit, j'entends des rongeurs courir sur le toit. Sinon c'est tres calme et mon sommeil est profond et reparateur; je me sens bien paisible.
Sunita est jolie et amicale, son anglais est excellent. Elle est studieuse et ambitieuse: elle veut, tout comme son frere, aider sa mere qui les a supportes quand leur pere les a abandonnes pour refaire sa vie avec une autre femme. Benita est souriante mais ne parle pas anglais. Ils ont connu des annees de vache maigre, ou meme le riz etait rare et ou les enfants n'avaient que peu de vetements et un sac de plastique en guise de sac d'ecole. Dinesh envisage d'aller travailler deux ou trois ans a Dubai pour amasser l'argent necessaire pour marier sa soeur, ensuite seulement il pensera a lui. Il est vraiment mature et responsable pour un jeune homme de vingt-trois ans! Ils ont un terrain qui pourrait servir pour un gite, ce serait son reve. Il veut egalement un jour creer une fondation pour venir en aide aux orphelins. Je l'admire!
Je vais dormir chez eux deux nuits et on me traite avec tant d'egards que j'en suis embarrassee. Je ne peux lever le petit doigt et la maman a mon depart me donne un pashmina, j'en ai les larmes aux yeux...On me fait promettre de revenir l'an prochain et de rester plus longtemps, je dis : oui, a condition que vous me laissiez faire la vaisselle! Ils sont incroyable de gentillesse, Sunita me fait cadeau d'un carnet pour ecrire mon journal, je pars en laissant encore une partie de mon coeur derriere moi, presqu'a regret. Benita m'a d'ailleurs fait le plus beau compliment en disant a Dinesh que j'avais "a nepali heart"! Ils ont vraiment le coeur sur la main.
Je pars pour un long trajet de bus (un paysan monte avec au moins quinze gros sacs de riz!) et retourne dans la famille Shresta, chez Ellen et Luan et c'est a nouveau la joie: la maman en particulier est tres complice et j'adore la taquiner gentiment. Ils sont adorables! Meme Mamou m'a adoptee et me demande si je vais les oublier, si je vais y retourner...Ils me demandent d'emmener ma mere l'an prochain, ils voudraient la connaitre! Ils sont tellement hospitaliers, c'est fou. Ellen me demande de lui enseigner quelques techniques de massage, elle s'exerce sur sa soeur pendant que la famille ecoute Big Boss dans le salon (version Indienne de Big Brother). J'ai reve cette nuit-la que j'etais en montagne pour faire du ski alpin mais il n'y avait pas de neige, c'etait a la fois dangereux et desagreable... Bizarre.
Le matin, nous allons au temple de Patan: la famille fait un puja, des offrandes pour Dasain. Les parents sont profondement devots, ca fait partie de leur quotidien. Puis, Bidhya la maman me fait cadeau d'un magnifique sari rouge, c'est incroyable comme generosite, eux aussi me traitent comme un invite de marque, voire une princesse! Donc, essayage et seance de photo: les filles sont epatees de me voir ainsi traditionnellement vetue. La couleur rouge est associee au mariage, donc on me dit qu'il ne manque plus que le mari! J'en connais qui vont prier pour moi, ca fait chaud au coeur... En se quittant, Ellen me dit: si nous avons fait quoi que ce soit qui ait pu te blesser ou te decevoir, s'il-te-plait pardonne-nous. Dinesh aussi m'avait dit la meme chose, c'est une coutume nepalaise et c'est dit avec une sincerite touchante. J'ai tente de balbutier quelque chose de semblable mais on m'a plaque une main sur la bouche! Ils sont tellements speciaux ces gens-la, c'est indescriptible. J'ai vraiment envie d'aider Dinesh et sa famille. (Je lui ai offert une guitare et il etait aux anges, je crois qu'il en joue tous les jours.)
Le 23, il vient me reconduire a l'aeroport, nous avons tous deux le "motton" dans la gorge. L'heure est venue de quitter cet endroit magnifique ou j'ai vecu tant de choses marquantes en peu de temps. L'an prochain je me promets de revenir pour une periode plus prolongee et de faire du benevolat avec les enfants. L'aeroport de Katmandu est etonnament petit et desert; en seulement 45 minutes j'ai franchi toutes les etapes et je relaxe sur un moelleux divan en simili-cuir, gonflee de tendresse et de tristesse, etourdie de toute la beaute de ces rencontres, fatiguee mais contente et surtout confiante que j'y reviendrai. ( Nepali ho!)
Premier vol facile: l'avion est a moitie vide et le trajet, moins long que je le pensais. A Kuala Lumpur, j'ai une nuit d'attente dans l'environnement aseptise mais je dors tres mal, a cause du boucan que font les enfants qui jouent et declenchent la sonnerie stridente de fauteuils a massage... Enteka, ayant tant bien que mal reussi a somnoler trois ou quatre heures sur mon tapis de yoga , je me leve fripee a 4h30, mange une soupe et hop, l'embarquement debute a 6h. Le vol pour Jakarta est bref et me voila soudain engouffree dans un chaudron indonesien de vapeurs equatoriales; il faut deux heures trente sous un soleil sadique pour rejoindre la rue Jaksa, a 25 km seulement de l'aeroport... J'aboutis suante et collante dans un gite miteux et relativement cher mais je m'en fous, trop claquee pour chercher ailleurs. La salle de bain est crade et les murs moisis, j'ai envie d'envoyer une photo au Lonely Planet, qui recommendait cet endroit a la limite de l'insalubrite! Un gars dans la chambre voisine de la mienne s'est fait attaquer par des puces de lit, j'ai eu plus de chance que lui.
"Life felt open, intensely so.
I felt like I should-like it is my sacred task-
to move unafraid into the emptiness."
-Manjushree Thapa
Je n'en reviens tout simplement pas de voir combien rapidement les deux dernieres semaines ont file!
Le 19 octobre, j'ai passe l'apres-midi a Pashupatinath, un temple hindou avec ghats de cremation, sorte de mini-Varanasi flanque de sa poignee de babas peinturlures et couverts de cendres qui se font tirer le portrait moyennant quelques roupies, de singes chapardeurs en goguette au milieu des vendeurs de the trop sucre, sans oublier ces familles entieres multipliant les actes de devotions; certaines souriantes et d'autres en pleurs, accompagnant la depouille d'un aine dans son dernier rituel au bord de l'eau...bref, je me serais crue retournee en Inde, avec la musique, les sons de cloche, les psalmodies et les odeurs de ghee des lampes!
En fin de journee, je suis invitee dans la famille de Luan et d'Ellen, deux soeurs charmantes rencontrees au festival de musique de Patan, un mois plus tot. Nous etions restees en contact via Facebook et j'ai ete recue de facon tres chaleureuse par toute la famille: ils etaient rieurs, ca respirait le bonheur dans cette maison. La nourriture fut delicieuse et la soiree memorable, dans une rare bonne humeur pleine d'humour. C'etait l'anniversaire de Luan, nous avons mange le gateau avant le souper, etrange. Il y avait des tantes, oncles, cousins et Mamou, la grand-mere frele et souriante, qui me rappelait un peu Ti-Guite, ma propre mamie aux yeux petillants de douce malice. Nous avons mange assis par terre, puis j'ai placote avec les jeunes dans la chambre, enfin nous avons chante quelques bajhans dans le salon, ce fut leger et joyeux! On m'a garde a dormir, et meme si j'ai bien trop mange, ce fut reposant. C'est une famille aisee, ils ont une belle maison.
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Au matin, la famille au complet voudrait me garder mais j'ai rendez-vous avec Dinesh, je me rends chez lui a Changu Narayan, je suis tres contente de le revoir et de rencontrer sa mere Benita et sa soeur Sunita. Sa maison est modeste mais situee dans un lieu enchanteur, a dix minutes a pied du village, donc nul bruit de voiture et superbe vue sur les environs. Ils n'ont ni salle de bain, ni eau courante; ils vont a la fontaine publique pour avoir de l'eau et partagent une "becosse" avec les voisins. Jusqu'en 2010, ils vivaient dans une seule piece mais ils disposent maintenant de trois (petites) pieces; la jeune soeur dort dans la cuisine. Ils doivent se laver tout habilles, dehors et brulent leurs dechets dans la cour. La nuit, j'entends des rongeurs courir sur le toit. Sinon c'est tres calme et mon sommeil est profond et reparateur; je me sens bien paisible.
Sunita est jolie et amicale, son anglais est excellent. Elle est studieuse et ambitieuse: elle veut, tout comme son frere, aider sa mere qui les a supportes quand leur pere les a abandonnes pour refaire sa vie avec une autre femme. Benita est souriante mais ne parle pas anglais. Ils ont connu des annees de vache maigre, ou meme le riz etait rare et ou les enfants n'avaient que peu de vetements et un sac de plastique en guise de sac d'ecole. Dinesh envisage d'aller travailler deux ou trois ans a Dubai pour amasser l'argent necessaire pour marier sa soeur, ensuite seulement il pensera a lui. Il est vraiment mature et responsable pour un jeune homme de vingt-trois ans! Ils ont un terrain qui pourrait servir pour un gite, ce serait son reve. Il veut egalement un jour creer une fondation pour venir en aide aux orphelins. Je l'admire!
Je vais dormir chez eux deux nuits et on me traite avec tant d'egards que j'en suis embarrassee. Je ne peux lever le petit doigt et la maman a mon depart me donne un pashmina, j'en ai les larmes aux yeux...On me fait promettre de revenir l'an prochain et de rester plus longtemps, je dis : oui, a condition que vous me laissiez faire la vaisselle! Ils sont incroyable de gentillesse, Sunita me fait cadeau d'un carnet pour ecrire mon journal, je pars en laissant encore une partie de mon coeur derriere moi, presqu'a regret. Benita m'a d'ailleurs fait le plus beau compliment en disant a Dinesh que j'avais "a nepali heart"! Ils ont vraiment le coeur sur la main.
Je pars pour un long trajet de bus (un paysan monte avec au moins quinze gros sacs de riz!) et retourne dans la famille Shresta, chez Ellen et Luan et c'est a nouveau la joie: la maman en particulier est tres complice et j'adore la taquiner gentiment. Ils sont adorables! Meme Mamou m'a adoptee et me demande si je vais les oublier, si je vais y retourner...Ils me demandent d'emmener ma mere l'an prochain, ils voudraient la connaitre! Ils sont tellement hospitaliers, c'est fou. Ellen me demande de lui enseigner quelques techniques de massage, elle s'exerce sur sa soeur pendant que la famille ecoute Big Boss dans le salon (version Indienne de Big Brother). J'ai reve cette nuit-la que j'etais en montagne pour faire du ski alpin mais il n'y avait pas de neige, c'etait a la fois dangereux et desagreable... Bizarre.
Le matin, nous allons au temple de Patan: la famille fait un puja, des offrandes pour Dasain. Les parents sont profondement devots, ca fait partie de leur quotidien. Puis, Bidhya la maman me fait cadeau d'un magnifique sari rouge, c'est incroyable comme generosite, eux aussi me traitent comme un invite de marque, voire une princesse! Donc, essayage et seance de photo: les filles sont epatees de me voir ainsi traditionnellement vetue. La couleur rouge est associee au mariage, donc on me dit qu'il ne manque plus que le mari! J'en connais qui vont prier pour moi, ca fait chaud au coeur... En se quittant, Ellen me dit: si nous avons fait quoi que ce soit qui ait pu te blesser ou te decevoir, s'il-te-plait pardonne-nous. Dinesh aussi m'avait dit la meme chose, c'est une coutume nepalaise et c'est dit avec une sincerite touchante. J'ai tente de balbutier quelque chose de semblable mais on m'a plaque une main sur la bouche! Ils sont tellements speciaux ces gens-la, c'est indescriptible. J'ai vraiment envie d'aider Dinesh et sa famille. (Je lui ai offert une guitare et il etait aux anges, je crois qu'il en joue tous les jours.)
Le 23, il vient me reconduire a l'aeroport, nous avons tous deux le "motton" dans la gorge. L'heure est venue de quitter cet endroit magnifique ou j'ai vecu tant de choses marquantes en peu de temps. L'an prochain je me promets de revenir pour une periode plus prolongee et de faire du benevolat avec les enfants. L'aeroport de Katmandu est etonnament petit et desert; en seulement 45 minutes j'ai franchi toutes les etapes et je relaxe sur un moelleux divan en simili-cuir, gonflee de tendresse et de tristesse, etourdie de toute la beaute de ces rencontres, fatiguee mais contente et surtout confiante que j'y reviendrai. ( Nepali ho!)
Premier vol facile: l'avion est a moitie vide et le trajet, moins long que je le pensais. A Kuala Lumpur, j'ai une nuit d'attente dans l'environnement aseptise mais je dors tres mal, a cause du boucan que font les enfants qui jouent et declenchent la sonnerie stridente de fauteuils a massage... Enteka, ayant tant bien que mal reussi a somnoler trois ou quatre heures sur mon tapis de yoga , je me leve fripee a 4h30, mange une soupe et hop, l'embarquement debute a 6h. Le vol pour Jakarta est bref et me voila soudain engouffree dans un chaudron indonesien de vapeurs equatoriales; il faut deux heures trente sous un soleil sadique pour rejoindre la rue Jaksa, a 25 km seulement de l'aeroport... J'aboutis suante et collante dans un gite miteux et relativement cher mais je m'en fous, trop claquee pour chercher ailleurs. La salle de bain est crade et les murs moisis, j'ai envie d'envoyer une photo au Lonely Planet, qui recommendait cet endroit a la limite de l'insalubrite! Un gars dans la chambre voisine de la mienne s'est fait attaquer par des puces de lit, j'ai eu plus de chance que lui.
"Life felt open, intensely so.
I felt like I should-like it is my sacred task-
to move unafraid into the emptiness."
-Manjushree Thapa
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